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| Anaïs Dujardin | Arts et Culture

« De celles qui osent » – Série féministe et lesbienne

(Temps de lecture: 4 - 7 minutes)

« De celles qui osent » – Série féministe et lesbienne

Découvrez la série féministe lesbienne "The Bold Type", "De celles qui osent" en français

Le titre original de la série est The Bold type. Sa traduction en français est malheureusement peu utilisée, sauf bien évidemment chez nos amies québécoises où on veille au grain de la défense de la langue française. C’est dommage, car pour une fois la francisation de l’intitulé est parfaitement réussie, même si bold induit bien la notion d’audace, ce mot sous-entend également une sorte d’effronterie, voire de provocation.

Sommaire

De celles qui osent est une série produite par Universal Television et créée par Sarah Watson en cinq saisons de 2017 à 2021. Elle comprend 52 épisodes de 40 minutes. Elle a été originellement diffusée sur Freeform et ABC Spark et ensuite sur Prime Video et Téva en France.

Même si cela est un peu réducteur et caricatural, on peut considérer que De celles qui osent est une adaptation du très célèbre Sex and the city, puisque la série met en scène des jeunes femmes libérées dans la ville de New York.

Le synopsis est le suivi des carrières et des vies sentimentales de trois jeunes femmes travaillant pour le magazine féminin Scarlet. Elles sont encouragées et aidées par Jacqueline, la rédactrice en chef, séduisante quinquagénaire, au jugement fort et à la volonté farouche.

Il s’agit de Jane, Sutton et Kat. Elles sont liées par une amitié fusionnelle et une entraide mutuelle. Leur « quartier général » chez Scarlet est le dressing du pôle « mode » du magazine.

Jane

Quand commence la série, Jane Sloan interprétée par Katie Stevens, vient d’être nommée rédactrice de la rubrique des sujets de société. C’est une journaliste très talentueuse à la plume remarquable. Elle est issue de la classe moyenne, et a subi un traumatisme avec la perte de sa mère victime d’un cancer du sein, alors qu’elle n’était encore qu’une enfant. Cela lui fera prendre des décisions déchirantes et très dramatiques dans sa vie personnelle.

Encouragée par Jacqueline, elle rencontre beaucoup de succès en écrivant des articles sur des sujets délicats. Il lui arrive aussi, à cause d’un enthousiasme débordant « de se planter ». Elle n’hésite pas non plus à se mettre en porte-à-faux vis-à-vis de certains membres du conseil de direction, étrangement constitué uniquement d’hommes. Cela lui vaut quelques ennuis.

Au niveau sentimental, c’est également compliqué. Jane, éternelle inquiète, au début de la série semble éprouver des difficultés à se « fixer ». Au fil du temps, cela devient le contraire puisqu’elle connaît ce qu’on appelle désormais un « polyamour » semblant irrésolvable.

Sutton

Des trois, Sutton Brady, à qui Meghann Fahy prête vie, est celle que la vie a moins favorisée. Elle provient d’une famille d’un milieu populaire. Son père a abandonné sa mère, qui depuis sombre dans l’alcoolisme. Longtemps, chez Scarlet elle doit se contenter d’une modeste place d’assistante administrative auprès d’une rédactrice prétentieuse et peu compréhensive. Le rêve de Sutton c’est la mode et le stylisme. Avec l’appui de Jacqueline elle parvient à décrocher le poste d’assistante du directeur black et gay du pôle mode du magazine, Oliver Grayson. Celui-ci sous des airs faussement moqueurs et méprisants (il appelle Sutton, « la rousse »), se rend vite compte que sa nouvelle assistante est enthousiaste, douée et efficace, et c’est une forme d’amitié qui prévaut alors.

Question cœur, c’est à la fois simple et compliqué. Dès le début de la série on sait qu’elle est éperdument éprise de Richard Hunter, l’avocat du comité de gestion de Scarlet, étrangement composé que d’hommes. Au cours des cinq saisons leur relation connaît des hauts et des bas, allant jusqu’au mariage et… divorce, pour s’avérer plus solide qu’elle ne le paraît. Ce qui est intéressant c’est qu’avec Richard, les scénaristes ont enfin créé un homme qui fait plus de concessions qu’il n’en reçoit.

Kat

Elle, c’est la fille « de bonne famille ». Kat Edison, jouée par la magnifique métisse australienne Aisha Dee, est l’unique enfant d’un couple interracial de psychiatres reconnus. Chez Scarlet elle est en charge des réseaux sociaux. Non seulement pour assurer la visibilité du magazine, mais également pour lancer des alertes ou des événements. Et là, le moins que l’on puisse dire c’est que ça marche du tonnerre. Que ce soit le compte personnel de Kat ou la page du magazine, elle rassemble des dizaines de milliers de followers. Très vite, avec Jane elles deviennent les favorites de Jacqueline.

Au niveau de la vie amoureuse, quand commence la série, elle vit au jour le jour des expériences sans lendemain. Elle rencontre la photographe Adena El-Amin (Nikohl Boosheri), iranienne et musulmane, mais néanmoins lesbienne assumée et militante. Alors que celle-ci essaie de draguer Kat, cette dernière lui répond la phrase passe-partout, triomphe de l’auto-persuasion : « Ne te fatigue pas, je suis hétéro de chez hétéro ». Moins de deux épisodes plus tard elles passent une nuit ensemble…

Le grand mérite des scénaristes est de mettre à profit les cinq saisons pour explorer les problèmes que rencontrent ou peuvent rencontrer les lesbiennes. Visibilité, acceptation et regard des autres, amour, fidélité du couple, bisexualité, pratiques sexuelles, etc. Kat se révèle très vite enthousiaste de sa nouvelle orientation et, « elle en fait des tonnes » pour son coming-out, ici aussi dans une espèce de méthode d’auto-persuasion. Trop pour Adena qui, un soir, publiquement et devant Jane et Sutton, lui assène cette réplique cinglante : « Ouais, mais tu seras une véritable lesbienne le jour où tu oseras me lécher la ch**** ». De même, la créatrice ne verse pas dans le manichéisme et les homosexuelles peuvent également avoir tort. Ainsi, Adena est parfois à la fois tolérante mais aussi intransigeante. Elle accepte sans état d’âme que sa compagne fasse son expérience sexuelle dans d’autres bras, mais en même temps éprouve une véritable phobie envers la bisexualité et en devient injuste.

Fait remarquable, les parents de Kat, sans doute à cause de leur profession, non seulement acquiescent les choix de leur fille, mais accueillent Adena avec chaleur.

Anecdotes

La créatrice a dit qu’elle s’était inspirée du magazine Cosmopolitan pour créer Scarlet et de sa directrice en chef pour le personnage de Jacqueline. C’est vrai que le graphisme des couvertures du magazine imaginaire ressemble fort à celui de l’original.

Plusieurs invité(e)s (mannequins ; actrices ; sportives ; etc.) jouent leur propre rôle dans certains épisodes.

L’épisode 6 de la saison 1 s’intitule : Libérez les tétons. Il aborde le sujet controversé de la présence de seins nus dans les médias aux États-Unis. Dans l’épisode, Adena pour un travail commandé par Scarlet, photographie des mannequins dénudés et par esprit de solidarité et de respect vis-à-vis d’elles, se dévêt complètement. Pour la première fois de ma vie de spectatrice j’ai vu un corps flouté dans une FICTION ! Je pense qu’il s’agit d’un bel exemple d’auto dérision…

En conclusion, si vous ne l’avez pas déjà regardée, je vous recommande chaudement cette série très féministe et lesbienne. Personnellement, j’y ai éprouvé une véritable addiction. Toutefois, la série se termine intelligemment ne laissant aucun sentiment d’inachevé.

Une très belle réussite !

La bande annonce