Le yuri, le manga lesbien japonais centré sur les relations entre femmes
Je suis une grande lectrice de manga et notamment de Yuri. Je ne vais pas vous refaire l’histoire du Yuri à travers les âges, n’y voyez pas un essai complet sur le sujet : Wikipédia est là pour ça ! Voyez une petite synthèse simple et sans prétention pour les non-aficionados.
Définition
Le yuri (百合) est un manga, une bande-dessinée japonaise, centré sur les relations entre femmes. Toute relation : qu’elles soient fusionnelles, platoniques, spirituelles, sentimentales, émotionnelles ou sexuelles.
L’idéogramme yuri (百合) signifie “lys” (symbole de la pureté féminine au Japon) et c’est la raison pour laquelle, lorsque vous lisez un yuri, ces fleurs peuvent apparaître au gré des pages, souvent pour illustrer la métaphore des “papillons dans le ventre”, du coup de foudre. Yuri fait aussi référence au Yurizoku, les pages consacrées aux lettres et aux rencontres entre femmes dans les magazines gays japonais comme Barazoku et Aran, populaires dans les années 1970.
Un peu d'histoire
Pour retracer l’origine du Yuri, on rappelle souvent le esu, un (エス), un genre littéraire japonais du début du XXème siècle qui aborde exclusivement les relations partagées entre une écolière plus âgée qu’une autre, à une époque où les écoles ne sont pas mixtes. Pour l’anecdote, dans ces écoles pour filles, on apprenait à être une bonne future épouse, les vraies écoles étant réservées aux garçons. Les Yuri vont donc principalement se dérouler dans le cadre scolaire, à cet âge où les jeunes filles ne sont pas mariées et pas encore adultes et où tout ce qui arrive n’est pas important.
Avant les années 2000, le yuri n’a pas vraiment d’identité et se focalise sur la relation purement sexuelle. Il existe des yuri très dramatiques qui abordent la question lesbienne, mais elle est reproduit des codes et des thèmes convenus. C’est souvent l’histoire d’une jeune fille qui va être mariée contre son voeu alors qu’elle aime une autre fille de son école, ou bien d’une femme malheureuse dans son couple et qui se laisse séduire par une femme. L’issue est souvent tragique. Le meilleur exemple est sans doute celui de Shiroi heya no futari de Yamagishi Ryouko.
En 1960, des femmes commencent à dessiner et à reprendre la question en main. En 1985, le gouvernement japonais autorise les femmes à travailler. Elles peuvent subvenir seules à leurs besoins. Les issus des yuri deviennent moins dramatiques, comme Moonlight Flowers de Tsukumo Mutsumi.
L’impact de Sailor Moon permet au Yuri de prendre de l’ampleur et il franchit les frontières (l’accès à internet et l’arrivée des anime aident également à populariser le mouvement). Il n’y a rien de yuri dans Sailor Moon, mais les auteurs de dōjinshi (mangas amateurs) se prennent d’affection pour les personnages Sailor Neptune et de Sailor Uranus, deux des “magical girl” dont ils imaginent la vie de couple (Messiah de Ginga Natsuka; Million Kisses de Morinaga Milk).
À partir de 2000, des magazines yuri voient le jour : Yuri Shimai , Comic Yuri Hime , Tsubomi, Hirari etc. Ils contribuent à créer un véritable genre.
Les genres de yuri lesbien
Dans ces mangas, on retrouve toujours un peu les mêmes couples :
- Le plus populaire et le plus présent est la “petite soeur” et la “grande soeur” (d’où l’influence du esu). La plus jeune est naïve et a besoin d’être guidée. Elle est prise en charge par une “grande soeur” charismatique. Leur amour est chaste et platonique la plupart du temps. On confond admiration et amour. On ne parle pas de sexualité ou d’homosexualité.
Exemples : Maria-sama ga Miteru de konno oyuki ou Strawberry Panic de Kimino Sakurako.
- Dans la même veine, on a aussi l’image de l’écolière naïve qui admire le “prince” de l’école, une version féminine du prince charmant.
Exemples : Ohimesama no Kagami de Morinaga Milk, Yamada to Kase-san* de Takashima Iromi ou I'll Send Her Home on the Last Train ou Watashi Baka de Amagakure Gido
- Lorsqu’on se laisse glisser vers l’admiration, on retrouve l’élève et la professeure. C’est l’amour impossible tant que l’élève n’est pas majeure ou tout au moins diplômée.
Exemple : Hoshikawa Ginza Yonchoume de Kurogane Ken ou de Dear my teacher de Ajiichi.
- Les amies d’enfance qui tombent amoureuses sont un thème récurrent également.
Exemple : Netsuzou Trap de Kodama Naoko, Fleurs bleues* de Takako Shimura ou Tsuki to Koi wa Michireba Kakeru by Tokuwo Tsumu
- Les amours entre collègues
exemple : Ebisu-san And Hotei-san de Kizuki Akira ou A Flower in the Storm de Takemiya Jin
Les autres genres
Il y a également de nombreux yuri qui abordent la fantasy, la science-fiction ou le surnaturel. Les couples les plus représentés sont l’humaine et la démone Beauty and the Beast Girl de Neji ; les femmes-chat (Isn't The Moon Beautiful de Itou Hachi); le robot humanoïde (Chirality de Urushihara Satoshi), l’alien (Blue Drop de Yoshitomi Akihito), la sorcière (Salomelic de Hakamada Mera), le vampire (Shoujo-tachi no Kizuato ni Kuchizuke wo de Haruhana Aya), etc
J’ai laissé de côté les yuri qui abordent la question de l’inceste, de près ou de loin. Il n’y a pas de jugement moral dans ces yuri qui s’apparentent à du “hentai” (manga pornographique). Il y existe également des histoires douces, comme dans Citrus (les sœurs sont des demi-soeurs). L’amour des deux demi-soeurs est abordée, mais les questions d’un pseudo-inceste ou de l’homosexualité sont à peine effleurées. Dans Candy Boy de Touge Hiro, l’une des sœurs-jumelle a conscience de son amour incestueux, mais ne peut se résoudre à y renoncer.
Le yuri montre des relations entre femmes, platoniques ou non, mais peu d’entre eux réfléchissent à la question du lesbianisme. Au mieux, l’héroïne s’étonne de pouvoir aimer une autre femme, elle pense rarement aux impacts et aux conséquences sur sa vie sociale et ne réfléchit pas au sujet. Cet aspect est bien plus exploré par les Manhwa et les Webtoons.
Et si vous me demandez quels sont mes manga préférés, c’est un crève-coeur de choisir, mais je vous conseillerais All we need is love* de Amano Shuninta, Beauty and the Beast Girl de Neji, tous les mangas de Takemiya Jin et Octave* de Akiyama Haru.
* ces yuri sont publiés en français
Quelques recommandations en vidéos
Sources : https://lesbrary.com/ - https://journal.transformativeworks.org
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Olin Torvingen
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