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| Alexia Damyl | Arts et Culture

Film lesbien : "Les Meilleures" de Marion DESSEIGNE-RAVEL

(Temps de lecture: 2 - 4 minutes)

Film lesbien : Les Meilleures

Écrit et réalisé par Marion DESSEIGNE-RAVEL - France 2021 1h21mn - avec Lina El Arabi, Esther Bernet-Rollande, Mahia Zrouki...

Avec un titre pareil et une bande-annonce mettant en scène deux jeunes filles s’aimant sur les toits de la "té-ci", ma curiosité sur ce film lesbien a tout de suite été titillée. Le rendu est-il à la hauteur de la promesse faite dans les 1 minute et 55 secondes de présentation visible ici ?

Synopsis

Sur un mur de mon quartier, on a tagué : le premier qui tombe amoureux a perdu.
C'est vrai. Parce qu’après, tout le monde parle sur toi et t’es à la merci.
J’ai perdu. Je suis amoureuse d’une fille, je ne sais pas quoi faire…

Concrètement, ça parle de quoi ?

Dès les premières images, le spectateur est plongé dans un cinéma vivant, flirtant avec le documentaire, sans en être un. Plans en contre-plongées, caméra qui nous ballote au rythme nonchalant des pas de Nedjma, adolescente de seize ans d’origine maghrébine ; les prises de vues de ce film lesbien nous placent tout de suite dans l’ambiance de la cité. Et que dire des premières salutations échangées par les deux principales protagonistes : « Wesh ». S’ensuit alors une immersion totale au beau milieu de deux bandes rivales de filles. Celle de Nedjma, et l’autre à laquelle appartient Zina, sa voisine de palier, nouvellement arrivée dans l’immeuble. Ces deux-là s’observent, se fascinent, et pourtant, les codes sociaux et de l’adolescence leur dictent de se haïr plutôt que de chercher à se séduire. En dépit des conventions, Nedjma et Zina s’admirent, se désirent… la tension monte au fil des rencontres plus ou moins fortuites, dans un ascenseur traitant une voisine de « chôôôde » , au sein du local associatif du quartier ou encore sur leur palier, jusqu’au moment où tout bascule. Et dans leur cas précis, on pourrait dire qu’après le beau temps vient la pluie…

En dépit de paroles crues, vraies, collant au plus près de ces filles, ces bandes de copines, ces « meilleures » qui découvrent la mer, les vacances, l’amour, le film est bourré de sensibilité et de poésie. Les mots sont à la fois durs et touchants, les émotions intensément vécues, comme il sied à cet âge-là.

Mon avis sur le film

Certaines critiques reprochent à ce film lesbien son côté caricatural, ce qui est à mon sens totalement infondé. J’ai adoré cette ode à la liberté qui sort des sentiers battus en mettant, pour une fois, les filles à l’honneur. L’homophobie est un sujet tout en n’en étant pas un. Un air de légèreté souffle sur la situation de Nedjma pourtant assez pesante au départ. Comment assume-t-on sa préférence pour une femme lorsqu’on est une jeune fille issue d’un quartier ? Comment survit-on aux regards, aux insultes, à une petite sœur qui nous tourne le dos, ou au dégoût d’amies que l’on pensait être comme notre famille ? Les travers d’une société se disant moderne mais ne demandant qu’à évoluer encore sont bien présents dans ce long-métrage (tout comme dans la réalité), sans tomber dans le pathos. Ces jeunes femmes en devenir se cherchent, se bousculent, grandissent. Elles rient fort, parlent trop, s’adorent et se haïssent avec l’intensité liée à leur âge « citius, altius, fortius » (plus vite, plus haut, plus fort) comme la devise olympique. Il y a dans leurs maladresses quelque chose d’intensément touchant.

Pour conclure

Je terminerai avec une citation issue des échanges SMS des héroïnes et qui a définitivement fendu ma carapace :

« Zina, depuis que l’on se connaît je suis comme en plusieurs morceaux. J’ai le cœur comme un marteau-piqueur ».

« Les meilleures » est donc un film lesbien résolument humain et optimiste, sans pouvoir être qualifié non plus de naïf. À mon sens, le pari de la réalisatrice est réussi, elle nous embarque avec elle dans un univers jusqu’alors peu exploré au cinéma et le fait avec brio. Un film bouleversant que je conseille donc, pour les amoureux(ses) de la vie, de l’amour. Un titre qui redonne foi en l’humain.

Par Alexia Damyl