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| Amélie N. | Arts et Culture

J’ai revu "Gypsy", la série lesbienne insensée de Naomi Watts et voici ce que j’en pense

(Temps de lecture: 3 - 6 minutes)

J’ai revu "Gypsy", la série lesbienne insensée de Naomi Watts et voici ce que j’en pense

Je sais ce que vous vous dites : qui, en possession de toutes ses facultés, aurait envie de revoir Gypsy, ce pseudo thriller psychologique que Netflix a annulé au bout d’une seule saison ? Réponse : une lesbienne désespérée, affamée de contenu lesbien.

J’avais regardé Gypsy lors de sa sortie en 2017 et, malgré les scènes lesbiennes brûlantes, j’étais d’accord avec ce que tout le monde disait de la série, à savoir qu’elle était, euh… mauvaise. La série est d’ailleurs notée 38 % sur Rotten Tomatoes. Mais cette semaine, dans un moment de solitude émotionnelle, j’ai décidé de lui donner une seconde chance. Et je suis ravie de l’avoir fait, parce que j’ai vécu un retournement de situation spectaculaire. Ce sera peut-être mon opinion la plus risquée à ce jour, alors je vais ajouter un point d’interrogation pour atténuer le choc : Gypsy est… une bonne série ?

Je sais que je ne suis pas la seule à défendre bravement cette opinion, parce que les fans de la série sont acharnés. L’année dernière, certaines en ont même été jusqu’à installer deux panneaux publicitaires à West Hollywood pour demander à Netflix de renouveler Gypsy. Pourquoi tant de passion pour une série où Naomi Watts livre probablement l’une de ses pires performances, dans une histoire qui ressemble à une suite improbable de Mulholland Drive que personne n’avait demandée ? Une série où aucun jeu d’acteur n’est véritablement remarquable, dont la musique et la photographie oscillent entre le kitsch et la comédie involontaire.

Pourquoi ? Pourquoi est-ce que nous nous en soucions autant ?

Sidney et Jean : tension lesbienne et obsession dans Gypsy

Parce que cette série est une fantaisie sexuelle. Si l’on retire les répliques mal écrites et la séduction gênante entre la prédatrice et sa proie, Gypsy est avant tout une fantasmagorie lesbienne, une sorte de porno avec plus de budget. La série suit Jean (Watts), une thérapeute cognitivo-comportementale qui se crée un alter ego, Diane, pour s’infiltrer dans la vie des proches de ses patients. Son idée du travail de terrain, c’est d’aller résoudre leurs problèmes à leur place en manipulant les gens de leur entourage. Et parmi ces personnes se trouve Sidney, l’ex-petite amie de son patient Sam.

Sidney représente ce genre d’histoire toxique, instable et irrésistible qui hante une vie entière, y compris celle de Sam. La méthode d’investigation principale de Jean dans ce cas précis ? Eh bien, coucher avec Sidney. Pour comprendre ce que Sam voyait en elle… il faut qu’elle le voie aussi en la désirant. C’est une fantaisie lesbienne sombre, tordue et toxique, construite autour de l’obsession romantique, des rapports de pouvoir et des écarts d’âge.

La dynamique femme plus âgée / femme plus jeune est extrêmement présente dans l’imaginaire lesbien actuel. Je me sens d’ailleurs personnellement responsable d’avoir contribué à la tendance des femmes queer qui déclarent ouvertement vouloir être assassinées par Rachel Weisz.

Ce fantasme de la femme plus mûre existe depuis longtemps dans le cinéma lesbien : dans Carol (2015) évidemment, raison pour laquelle les femmes queer veulent toutes être dominées par Cate Blanchett ; dans Chloe (2009), où Julianne Moore inspire autant de soumission que de fascination ; ou encore dans Loving Annabelle (2006), un film objectivement mauvais mais centré sur une romance interdite entre une professeure et son élève. Personnellement, j’adore les femmes plus âgées et je partage entièrement cette dynamique de pouvoir, alors oui, évidemment, j’ai envie de regarder une série érotique où une thérapeute riche dans la quarantaine séduit une musicienne de vingt ans à la dérive.

Gypsy : la série lesbienne sulfureuse avec Naomi Watts

Gypsy est kitsch, excessif, parfois ridicule, et j’ai parfois l’impression d’être une vieille dame affalée dans son fauteuil fatigué qui regarde ses "histoires" du soir. Mais c’est précisément ce qui rend la série si addictive ; c’est un bonbon visuel, facile à consommer, entièrement regardable. C’est une série sur le désir, la manipulation, le pouvoir et le sexe. C’est Cinquante nuances version lesbienne (deux épisodes ont d’ailleurs été réalisés par Sam Taylor-Johnson, qui a dirigé Cinquante nuances de Grey). Je peux la regarder en faisant glisser une infinité de profils sur Tinder, en ignorant volontairement les intrigues secondaires ou les problèmes conjugaux de Jean, mais en revenant immédiatement à l’écran dès que l’on passe aux scènes sexuelles, tel un vautour concentré. Gypsy est pour les lesbiennes ce que la chaîne Hallmark est pour ma grand-mère (paix à son âme, elle n’a rien demandé à cette comparaison).

Les lesbiennes adorent la tension sexuelle. Nous vivons pour un slow burn. Nous voulons des jeux psychologiques, un "vont-elles ou non", des regards lourds, des mains qui effleurent, jusqu’à ce que la frustration devienne insoutenable. Gypsy nous offre six épisodes entiers de cela, puis un feu d’artifice dans l’épisode 7. Gypsy nous donne un presque-baiser dans une boîte de nuit, quand Sidney plaque Jean contre un mur mais renonce à l’embrasser. Gypsy nous donne mille "presque". Une crise d’angoisse lors d’un rendez-vous au musée. Une scène de rêve où Sidney défait la cravate de Jean et déboutonne sa chemise. Un rapport clandestin dans les toilettes. Un moment de grinding sur une chaise. Gypsy nous donne une bande-annonce sur "Waiting Game" de Banks, une chanson lesbienne par essence (c’est une chanson lesbienne parce que j’ai eu des relations lesbiennes en l’écoutant, donc c’est canon). Gypsy n’était pas obligée d’aller aussi loin, mais elle l’a fait.

D’habitude, quand je me décide à revoir un film ou une série lesbienne kitsch, comme The L Word, Pretty Little Liars ou Orange is the New Black, je finis presque toujours frustrée. Je termine encore plus affamée de contenu lesbien de qualité. Je ressemble à Bob l’Éponge quand il sort de l’eau : desséchée, dramatique, désespérée. Mais pas cette fois. Revoir Gypsy a été la meilleure décision que j’aie prise en 2019. C’est peut-être la série lesbienne la plus torride jamais réalisée, et rien que pour cela, elle mérite le respect.

La bande annonce

Amélie N.

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