Pourquoi les couples lesbiens divorcent-ils plus souvent ?
Une nouvelle étude explore pourquoi les couples lesbiens divorcent plus souvent que la moyenne.
Pourquoi les couples lesbiens affichent-ils des taux de divorce plus élevés que leurs homologues gays ou hétérosexuels ? C’est la question à laquelle une nouvelle étude finlandaise tente de répondre, et ses conclusions pourraient surprendre.
Publiée le 9 septembre dans le Journal of Marriage and Family, l’étude intitulée « Same-Sex and Different-Sex Couples’ Divorce Risks : The Role of Cohabitation and Childbearing » (Risques de divorce chez les couples de même sexe et de sexe différent : le rôle de la cohabitation et de la parentalité) rappelle d’abord que les recherches précédentes montrent que les couples homosexuels - hommes et femmes - présentent un risque de divorce plus élevé que les couples hétérosexuels, les couples féminins étant les plus touchés, que ce soit en Suède, en Norvège, au Danemark, aux États-Unis ou au Canada.
Pour tenter de comprendre ce phénomène, les chercheuses ont analysé les données administratives finlandaises concernant tous les couples ayant contracté une union légale entre 2003 et 2020. Le mariage pour les couples de même sexe n’a été instauré qu’en mars 2017, mais les partenariats enregistrés étaient autorisés depuis 2002.
Au total, plus de 5.300 couples de même sexe ont été étudiés - dont 3.412 couples de femmes et 1.892 couples d’hommes -, ainsi que plus de 450.000 couples hétérosexuels. Dix ans après le mariage, 41% des couples lesbiens avaient divorcé, contre 27% des couples gays et 22% des couples hétérosexuels.
Contrairement aux clichés populaires sur les « U-Haul lesbians » (les couples qui emménagent ensemble très vite), l’étude montre que ce n’est pas la rapidité avec laquelle les partenaires s’installent ensemble qui compte, mais la durée de leur cohabitation avant le mariage. Plus celle-ci est longue, plus le risque de divorce diminue.
Ainsi, les couples de même sexe ayant vécu ensemble au moins sept ans avant de se marier présentaient les taux de divorce les plus faibles par an : 1,9% chez les couples lesbiens et 0,9% chez les couples gays. En revanche, ceux qui avaient emménagé ensemble la même année que leur union légale affichaient des taux bien plus élevés : 8,2% pour les couples lesbiens et 4,6% pour les couples gays.
Chez les couples hétérosexuels, la durée de cohabitation avant le mariage n’avait pas de lien significatif avec le risque de divorce.
« Nous avons constaté que les couples féminins se mariaient après des périodes de cohabitation prémaritale plus courtes que les couples masculins ou hétérosexuels, mais le rôle de cette variable dans leur risque de divorce plus élevé était moindre que prévu », a expliqué l’autrice de l’étude, Maria Elina Ponkilainen, au site PsyPost. « Cela montre que d’autres facteurs doivent expliquer la différence restante. »
Enfin, la présence d’enfants - qu’ils soient issus du couple ou d’une relation précédente - influence également la stabilité conjugale. Avoir un enfant d’une relation antérieure augmentait le risque de divorce, mais cet effet était moins marqué chez les couples de même sexe.
Bien que les couples de même sexe et de sexe différent ayant des enfants soient généralement moins susceptibles de divorcer que ceux qui n’en ont pas, la présence d’un enfant réduit moins le risque de divorce chez les couples lesbiens que chez les couples hétérosexuels. Les chercheuses avancent, en s’appuyant sur des études antérieures, que cela pourrait s’expliquer par le fait que les couples lesbiens ayant un enfant ensemble présentent souvent un statut socioéconomique plus élevé ; ils auraient donc une plus grande liberté financière pour mettre fin à une union insatisfaisante.
Elles ajoutent aussi que les couples féminins ressentent sans doute une pression sociale moindre à rester ensemble "pour les enfants", les femmes queer étant plus enclines que les couples hétérosexuels à partager équitablement la garde et les responsabilités parentales après une séparation.
« Les résultats montrent que l’on ne peut pas supposer que les facteurs connus pour favoriser la stabilité conjugale chez les couples hétérosexuels aient le même effet chez les couples de même sexe », souligne Maria Elina Ponkilainen.
Aucune étude n’est parfaite, précisent les chercheuses : le système de données finlandais ne contient pas d’informations officielles sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. De plus, les conclusions sont propres à un seul pays ; comme le rappelle Ponkilainen à PsyPost, « le contexte juridique et normatif de chaque pays influence les possibilités des couples de même sexe de se marier et d’avoir des enfants, ce qui peut aussi affecter la stabilité de leur union et leur risque de divorce ».
« D’autres facteurs expliquent le reste du taux de divorce plus élevé chez les couples lesbiens », poursuit-elle, « mais il est probable que ces éléments ne soient pas directement observables dans nos données administratives ».
En d’autres termes, nul besoin d’être chercheur pour savoir que les drames saphiques échappent toujours aux catégories simples.
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